Violences sexistes et sexuelles en entreprise : ce que la crise d’Ubisoft nous apprend

Violences sexistes et sexuelles en entreprise : ce que la crise d’Ubisoft nous apprend

Comportements sexistes, discriminations, plaintes ignorées : les dernières révélations sur l’affaire Ubisoft montrent que la direction et son service ressources humaines sont accusés d’avoir laissé faire les employés concernés par ces accusations de harcèlement et de comportements sexistes pendant des années.

De nombreux témoins ont par ailleurs expliqué avoir alerté les services des ressources humaines et les directions des studios, sans que rien n’ait jamais été fait pour sanctionner ces comportements.

Au scandale réputationnel se sont rapidement ajoutées des conséquences financières. Ubisoft a subi une perte nette de 126 millions d'euros lors de son exercice décalé 2019-2020, due notamment à une dépréciation d'actifs dans le jeu mobile, sur un chiffre d'affaires de 1,6 milliard d'euros, en chute de 14% sur un an. Lundi 13 juillet, son action à la Bourse de Paris chutait de plus de 9% à l'ouverture.

Retour sur les faits avec le témoignages des employées

Une ancienne employée, qui a témoigné sous anonymat, a écrit à l'AFP (Agence France Presse) que travailler sur la principale franchise de l'entreprise, Far Cry, lui a coûté "deux burn-out, le harcèlement et l'humiliation psychologiques et sexuels et les ressources humaines ne se sont jamais donné la peine de m'écouter".

Cette dernière a passé plusieurs années à travailler pour un jeu développé dans les locaux du studio montréalais d'Ubisoft. Dans une équipe qu'elle a décrite comme l'une des plus toxiques de l'immense studio de 3 000 personnes, la collaboratrice a déclaré qu'elle devait accepter des commentaires sur son état émotionnel et son apparence.

«Lorsque de simples artistes comme nous essaient de se défendre contre les réalisateurs, il est presque impossible que nos voix soient entendues», a-t-elle déclaré.

Ses commentaires sont proches d’une dizaine d'autres que l'AFP a pu recouper depuis la fin du mois de juin 2020, au moment où des témoignages ont commencé à apparaître sur les réseaux sociaux, d'abord dans le monde des jeux vidéo puis plus spécifiquement ciblant le groupe français.

Chez Ubisoft, le sexisme «est quelque chose qui est endémique, pas seulement à Montréal», a déclaré une employée de longue date.

Les Faits reprochés à l’entreprise par les témoignages de plusieurs employé.e.s depuis les révélations sur le net :

  • Burn out
  • Toxicité des collègues dans le développement
  • Comportements discriminants
  • Sexisme
  • Harcèlement et violences sexuelles
  • Humiliations
  • Déni des RH
  • Complicité des managers

Comment la direction d’Ubisoft a-t-elle réagi dans ce contexte de crise ?

Dans la tourmente après la vague d'accusations de harcèlement et de sexisme à l’encontre  d’employé.e.s d'Ubisoft, l'entreprise a d’abord réagi sous la contrainte.

Après avoir annoncé dans un premier temps que l’entreprise « prenait ces accusations très sérieusement », Ubisoft s’est résigné à publier un communiqué de presse le 25 juin dernier en présentant ses excuses.

« Nous sommes profondément désolés », explique la direction, qui annonce aussi avoir “déployé un audit interne, avec le support de consultants extérieurs... Selon nos résultats, nous agirons en conséquence et prendrons les mesures disciplinaires appropriées ».  « Nous voulons faire en sorte de mieux prévenir, détecter et punir les comportements inappropriés […] et allons mettre en place dans les prochains jours de nouvelles mesures ».

Avec 18 000 employés dans le monde - dont 20% de femmes dans les équipes de production - Ubisoft a depuis annoncé qu'il allait tourner une nouvelle page. Dans un communiqué, le PDG Yves Guillemot a promis "des changements majeurs dans la culture d'entreprise". Ce dernier a par ailleurs annoncé que l'éditeur mettait en place un groupe de travail pour faire face aux graves problèmes au sein de l'entreprise suite à une série de plaintes pour abus.

Le vice-président éditorial et le directeur du marketing de la marque n'étaient que deux des personnes accusées d'abus sexuels ou de viol. Dans un message publié sur Twitter, Ubisoft a finalement suspendu les personnes impliquées et des mesures disciplinaires promises seraient prises.

Yves Guillemot a reconnu que "Ubisoft n'a pas respecté son obligation de garantir un environnement de travail sûr et inclusif pour ses employés".

L’avis de Mixity sur cette situation de violences sexuelles et sexistes en entreprise

Cette situation de crise majeure dans une entreprise de renom a un impact social et économique conséquent sur son développement et ses équipes.

Ubisoft n’a pas mesuré suffisament tôt les conséquences d’un laisser-faire qui s’avère largement préjudiciable à plusieurs niveaux : culture d’entreprise, bien-être des collaborateurs, réputation et marque employeur, performances économiques.

Non seulement, l'entreprise Ubisoft n’a pas géré un risque stratégique connu de la direction et présent dans l’organisation depuis plusieurs années, mais au moment où l’affaire a été révélée, elle n’a pas été à la hauteur de la situation.

Les prochaines décisions de la direction seront déterminantes pour rétablir une culture d’entreprise saine au sein des équipes.

Vous pouvez décider du départ de certaines personnes, c’est la première des mesures à prendre, mais si ces dernières sont tenues responsables à titre individuel, cela n'aura pas nécessairement d'impact sur la culture de l'organisation dans son ensemble.

Les déclarations et les réactions des sociétés de jeux telles qu’Ubisoft sont d’abord des tentatives "d'apaiser" les discussions et les réactions jusqu'à ce que collaborateurs et internautes cessent de parler des problèmes des entreprises avec la diversité, l'inclusion et le harcèlement. Ce n'est pas une réponse suffisante à long terme.

Ces entreprises ne réalisent pas toujours qu'il existe une culture interne néfaste, qui plus largement n’encourage pas l’inclusion, notamment celles des femmes ici dans l'industrie du jeu vidéo. Et que c’est à ce problème qu’il est important de consacrer pour restaurer un climat positif dans l’entreprise.

Quelles solutions pour restaurer une culture d’inclusion ?


Il est important pour ces entreprises de s’engager dans des démarches et des preuves concrètes pour embaucher des candidat.e.s avec des profils de la diversité de genre, d'âge, de culture…

Et consacrer davantage de moyens à la formation sur les biais, les stéréotypes, la lutte contre les attitudes sexistes et propos discriminants, et également à la mesure d’impact de leurs politiques diversité et inclusion.

Ces entreprises doivent pouvoir s’engager dans une politique concrète d’inclusion suivi par des indicateurs et dans une communication transparente sur ces sujets, en s’assurant que les collaborateurs peuvent communiquer ouvertement sur toute attitude discriminante.

La première action permettant à la direction générale de l’entreprise de s’engager est d’annoncer à l’ensemble de ses équipes une “tolérance zero” sur les propos et attitudes discriminantes, avec un large dispositif de sensibilisation à une culture d’inclusion au sein de l’entreprise.

"Un changement de culture doit commencer au sommet et nous espérons beaucoup plus de mixité (Genre) et aussi que plus de personnes d’origines ethniques et sociales diverses se verront attribuer des rôles plus importants dans les sociétés de l’industrie du jeu vidéo pour que la diversité puisse aussi être un facteur majeur de l’acception et du respect d’autrui" souligne Sandrine Charpentier, CEO de Mixity.


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